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Pourquoi lo-fi ? Par opposition radicale à ceux qui prétendent qu'il y aurait de la « bonne » et de la « mauvaise sociologie ». Lo-fi car on peut faire de la sociologie sans être mutilé, limité, aliéné par le style académique pompeux, réactionnaire, ultra-sérieux et politiquement correct qui colonise les revues académiques.
Conséquence, la sociologie lo-fi peut être mal écrite, traiter de sujets introuvables (ou pas), être non-marchande, anti-système, etc. Cette orientation « atypique » et le flou qui entoure la notion, font que certaines analyses sortent parfois du cadre du laboratoire.
 

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Une discussion avec Emmanuel Wathelet

Auteurs : Benjamin Grassineau, Emmanuel Wathelet (voir aussi l'historique)
Date de création de l'article : 2013
Rubrique: La revue de sociologie lo-fi
Etat de la rédaction: finalisé
Droit de rédaction : ouvert sur invitation / auteurs invités: \EmmanuelWathelet
Licence : Licence Art libre


Création de la page: 26 novembre 2013 / Dernière modification de la page: 23 août 2022 / Propriétaire de la page: Benjamin Grassineau


Résumé :



Je recopie ici une discussion que j'ai eue avec Emmanuel Wathelet par courriel. J'y expose ma position sur le RSA, notamment. Certains passages sont coupés.

1ère réponse

Je veux bien travailler avec toi, pas de soucis, mais j'ai arrêté, sciemment, la recherche universitaire pour me consacrer à la science citoyenne. Je démarre un labo indépendant et alternatif en ce moment. http://labo.nonmarchand.org :) Tu peux t'y joindre si ça t'intéresse. C'est un peu l'équivalent de wikiversité, mais en spécialisé, et moins participatif.

Réponse d'Emmanuel

Le "sciemment" titille ma curiosité ;-) Merci pour ta réponse...

2ème réponse

Sciemment, cela demanderait un roman autobiographique pour être expliqué... Et peut-être une thérapie rogerienne... Disons que j'ai gardé un très mauvais souvenir des mes passages successifs dans le labo de centrale lille, puis dans une administration publique... Et plus généralement, je n'ai jamais pu saquer le milieu universitaire (au sens large). Un début de réponse ? Et je ne suis pas le seul.

Aujourd'hui, le RSA et mon potager me vont très bien. :-) Je n'ai pas besoin de plus pour réfléchir.

Reste à construire le réseau et la structure qui permet le déploiement d'une science citoyenne indépendante et conviviale. C'est ça l'intérêt et le défi. :-) C'est sûr que ce n'est pas la solution la plus facile, mais c'est la plus motivante et la plus excitante.

Au plaisir de te voir participer au labo. Note, si tu veux une relecture d'un texte sur WP, hésites pas.

Réponse d'Emmanuel

Le lien que tu donnes me fait un peu penser à ça (en Belgique) et à ça que tu dois connaître. En même temps, ce que tu décris est peut-être fort lié à la situation française? (Même si je crois en cela m'illusionner.) (...) Plus largement, tes positionnements semblent rejoindre les miens - et ceux de certains collègues à l'unif. Le problème là-dedans, c'est que ces revendications sont nécessairement couplées à de la précarité. Je n'imaginais pas la démocratie comme un système qui digérait si bien la contestation en la transformant en précarité invisible. Tu me fais penser à ce que j'avais lu à l'époque sur le groupe qu'on avait dit "de Carnac"...

3e réponse

Pas encore lu le lien, mais je réponds à vif.

Je ne suis pas d'accord avec toi pour deux raisons.

Le premier point de désaccord vient de la définition et le sens donné à la précarité. Personnellement, je me sens actuellement bien moins pauvre qu'avant. Je veux dire par là que la précarité choisie est vécue de manière bien plus positive qu'un travail contraint, pénible et désagréable, avec un salaire vite dilapidé dans des merdasses industrielles (cf. ma vie sur Lille) ! Désolé d'être aussi radical, mais sur ce point, j'ai parfaitement choisi mon mode de vie. Et ça me va très bien !!!! Je revendique le fait d'être pauvre. Et je m'accommode très bien de cette situation.

Le deuxième point vient du rapport supposé entre précarité économique et possibilité de contestation du système, voire de production intellectuelle. En fait, c'est un rapport inexistant.

Les troubadours et les intellectuels marxistes vivaient chichement !!! Et ils n'avaient pas Internet à leur disposition pour diffuser leurs poésies !!

En fait, l'idée qu'on ne pourrait pas faire de la recherche et contester le système sans avoir un poste s'appuie sur quelles données ? Aucune de sérieuse. Bien au contraire, avoir un poste impose des responsabilités et des contraintes en terme de publication, d'image, etc., qui ne vont pas (souvent) dans le sens d'une indépendance d'esprit. On peut se débrouiller, mais c'est dur. Si bien, qu'au final, les velléités contestataires finissent par s'étioler devant les perspectives de carrière et les contraintes professionnelles.

A l'inverse, la précarité économique n'implique pas forcément la précarité intellectuelle. Les moyens de diffusion sont aujourd'hui suffisamment accessibles à tous pour permettre le développement d'une science amateure, citoyenne et indépendante, mieux armée, à mon avis contre les dérives du capitalisme étatique, que la recherche universitaire ou professionnelle, soi-disant indépendante.

Enfin, dernier point, la précarité telle que je la vis, de façon volontaire, n'est pas une obligation pour un chercheur indépendant. La recherche prend certes du temps, mais elle est parfaitement compatible avec un travail salarié quelconque. Et pire, je ne suis pas certain qu'un glandu des universités françaises (qui n'a rien publié depuis 20 ans) ou un jeune loup de la micro-économie, qui publie 20 articles par an, serait plus productif qu'un chercheur amateur. Tout dépend naturellement quels critères on retient pour mesurer la production.

C'est sur ce genre de débat qu'il faudrait recentrer la problématique de la recherche. Car, actuellement, elle est surtout centrée sur le salaire des chercheurs professionnels. Mais, de mon point de vue, c'est un faux débat. La vraie question est plutôt: pourquoi la recherche professionnelle (rémunérée) a un quasi-monopole en terme de légitimité, du point de vue de la production et la diffusion scientifique ?

Quant à la question de la spécificité française, je n'y crois guère... C'est au mieux un peu accentué en France, où la tradition académique est très prégnante.

Bon, j'ai répondu un peu vite, et c'est pas très bien écrit, mais en gros, l'idée est là. Je revendique seulement le droit de faire de la musique en dehors du conservatoire !!! Après, à chacun de se débrouiller pour vivre sa passion. Et entre nous, on sait parfaitement que la recherche en sociologie, par exemple, n'est pas non plus une nécessité vitale pour les citoyens. Pour les sociologues oui, mais c'est un autre problème... Cf. feyerabend sur ce point précis:)

Sur ce, je regarde les liens... :) Ca me revient, j'ai effectivement entendu parler de la slow science, mais c'est un autre débat. Le problème, à mon avis, vient surtout des finalités (publier à tout prix), et du monopole des chercheurs professionnels sur les outils de production et de diffusion scientifique.

Réponse d'Emmanuel

Ok, je réponds tout aussi à chaud.

J'ai dû mal m'exprimer. Je comprends parfaitement ta démarche mais j'insiste sur le fait que le RSA n'est pas (si je ne m'abuse) une "allocation universelle" puisque tu es censé continuer à chercher un vrai boulot. Autrement dit, tu es perçu comme profitant d'un système. Le fait que tu le revendiques ne change rien à une réalité (économique, politique) qui cherche à exclure des démarches comme les tiennes. Pour le reste, je suis parfaitement d'accord avec toi, si plus de fric et de pouvoir supposait plus d'indépendance d'esprit, ça se saurait. Quant à l'intérêt réel de la recherche en sciences humaines et sociales, je me marre aussi (même si c'est elle qui me permet de bouffer et de nourrir mon bébé).

4e réponse

D'ac, je te réécrirai plus longuement...

En ce qui me concerne, le RSA est effectivement une solution que je juge provisoire. Néanmoins, je n'ai pas l'impression de profiter du système plus qu'un autre. Je suis payé pour consommer dans une société où la plupart des biens sont produits industriellement - et il faut bien les écouler. La question est surtout, aujourd'hui, de savoir qu'est-ce qui est productif et qu'est-ce qui ne l'est pas ? Quel travail l'est, et quelle part du travail salarié l'est ? Pour mémoire, Quesnay, physiocrate, "divise la société en deux secteurs (l'agriculture et le reste) et trois classes sur la base de leur rapport au produit net : la classe productive, composée essentiellement de fermiers, qui est la seule à pouvoir fournir un produit net, c'est-à-dire capable de multiplier les produits, la classe stérile, qui est composée de tous les citoyens occupés à d'autres travaux que ceux de l'agriculture, capable uniquement de transformer les biens sans les multiplier, et la classe des propriétaires terriens, dont la seule fonction est de dépenser la part du revenu qui leur est due, sans produire aucun bien." source wp.

On pourrait partir sur une toute autre définition de ceux qui profitent : c'est ceux qui disposent d'un emploi ou de ressources privées qui profitent du système au sens où ils excluent les autres de l'accès à ces ressources...

J'ajoute, au passage, qu'une large partie de mon revenu part en TVA (celle-ci n'étant pas dégressive) et autres dépenses dans des organismes publics (transports en particulier.)... Donc, au mieux, je gagne 200 à 300 euros nets par mois. Ce qui est à proprement parler scandaleux...

En tous les cas, la fonction socio-économique du RSA me paraît claire. Ca arrange un peu tout le monde... D'où sa persistance à droite comme à gauche. En cas de crise économique, c'est un bon amortisseur, puisque ça entretient une consommation minimale. Ca assure une certaine stabilité sociale - pas de misère trop visible. Et cerise sur le gâteau, ce ne sont pas forcément des citoyens "improductifs" (puisqu'une personne qui n'a pas de salaire n'en est pas pour autant inactive...), ils participent à la création de richesse sociale de diverses manières (associations, vie culturelle, auto-production, etc.)...

Cela dit, j'ai bien compris ton propos, d'un strict point de vue formel, et du point de vue des représentations collectives, je suis censé chercher un travail... Et effectivement, la réalité économique et sociale tend alors à exclure des démarches comme les miennes. Quant à la question de savoir si on travaille (dans un travail salarié) pour se nourrir... D'un strict point de vue économique et sociologique, ça me paraît difficile à défendre. Assurément, parmis les motivations qui nous poussent à travailler, il y a peut-être cette peur ancestrale en tête. Mais en ce moment, c'est la saison des pissenlits, et je me sens bien éloigné de la question... :-))

Bon, au plaisir qu'on en rediscute.

Proposition d'Emmanuel La proposition fait suite à notre première discussion.

Je me demandais en quelle mesure tu serais d'accord de faire une présentation - sachant que le thème peut être varié (...) Les modalités viendront certainement beaucoup plus tard mais, comprenant tes soupçons légitimes quant à l'académique, je tenais d'abord à m'assurer d'un accord de principe avant de faire quelque suggestion.

5e réponse

D'ac pour la présentation, mais ça peut être compliqué pour moi de me déplacer aussi loin ! Préviens moi donc longtemps à l'avance, à priori, je viendrai en low cost, voire en stop... Du point de vue de ma position par rapport à l'académique, je pense qu'il faut surtout mettre la recherche amateure et la recherche professionnelle sur un même niveau de légitimité. Mais je ne suis pas sûr d'être franchement anti-académique ! C'est surtout l'hostilité des acteurs de la recherche académique à l'égard des praticiens amateurs de la recherche qui me paraît problématique. De même que l'orientation des recherches publiques et leur mode de fonctionnement discriminatoire (publications, embauches, etc.).

Néanmoins, je ne vois pas pourquoi je me couperais de la communication avec le monde académique, tant qu'elle respecte certaines conditions : je suis par exemple hostile aux colloques qui font se déplacer beaucoup de monde avec un résultat quasi nul. Mis à part ça, je n'ai pas de raison de considérer le mode de diffusion académique des recherches comme meilleur ou plus légitime qu'un autre. Quant au fait qu'il soit financé par de l'argent public, c'est en effet problématique. Mais qu'est-ce qui n'est pas financé ainsi aujourd'hui ! Je prône pour ma part l'auto-financement des recherches, mais refuser de communiquer avec les chercheurs qui n'en font pas de même, c'est se couper du monde, et couler le principe de communication non discriminatoire pourtant nécessaire au développement des idées. Voilà pour ma position.




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