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Pourquoi le poulpe à lunettes ?

Auteurs: Benjamin Grassineau (voir aussi l'historique)
Création de l'article: 09 mars 2015
Etat de la rédaction: finalisé
Droit de rédaction: ouvert
Licence: Licence culturelle non-marchande


Création de la page: 27 mai 2016 / Dernière modification de la page: 17 avril 2024 / Créateur de la page: Benjamin Grassineau



Résumé:






Pourquoi affubler le laboratoire d'un nom pareil... ? Plusieurs raisons.

  • D'abord, parce que si le laboratoire se fut appelé L.M.S.C.T.U, c'eût été indéniablement casse-couilles.
  • Ensuite, parce qu'un poulpe avec des lunettes, ça a l'air super cool et super intelligent. Alors, vive le concept d'animal-totem qui renforce les liens - hélas s'amenuisant - avec notre mère nature.
  • C'est aussi adresser un clin d’œil à la culture libre (GNU, K-Meleon, etc.) dans laquelle ce projet s'inscrit.
  • Enfin, c'est une manière simple, rapide et efficace de dire bye-bye à toute prétention de paraître scientifique. Ce qui s'inscrit dans la démarche de recherche conviviale du laboratoire.

Voyons ce point plus en détail.

L'uniforme scientifique, on en veut pas !

C'est un fait. Lorsqu'un adepte de la théorie des ondes vibratoires quantiques du père Bourkanokowski (boudiou !) écrit un bouquin ou crée un centre de recherche-relaxation, il le barde d’apparats scientifiques.

Évidemment, ce n'est que du style, de la forme. Le fond reste nul. Pourquoi cette volonté de paraître scientifique ? Pour en imposer - et accessoirement vendre les produits dérivés de leur soupe insipide!

Les revues académiques font de même. Pour elles, et pour leur armée d'écrivaillons, il faut vendre. Or, pour cela, il faut avoir l'air sérieux, scientifique. Car la science n'est pas un truc de rigolos - sauf humour de chapelle, c'est un truc de mâles fortement couillus. Donc, pour « démontrer » qu'elles appartiennent à la grande « police de la connaissance1 », elles exhibent l'uniforme - le style pompeux et machiste des revues « scientifiques » et « pseudo-scientifiques », gavé de certitudes dogmatiques, comme d'autres exhibent leur uniforme.

Ouais... Mais être sérieux, avec tout ce que ça implique : exclusion, discrimination, prise de chou, discours hautain des universitaires, c'est pour les casse-burnes, les inquisiteurs et les charlatans ; c'est pour l'armée des fanatiques de la plume, qui vont se liguer en bloc contre les méchants « pseudo-scientifiques » imaginaires (les vendeurs de minéraux magiques) ! Et il est de plus en plus malaisé de différencier les deux camps...

Est-il nécessaire d'avoir l'air sérieux, « scientifique », pour faire de la recherche ? Avec le poulpe à lunettes, la réponse est donnée d'emblée. On s'en fout !

Pire, on a même pas envie d'avoir l'air « scientifique » ! Trop chiant. On prend un nom fantaisiste, comme ça, pas de confusion possible. Et au moins, ceux qui veulent participer au labo (ou simplement utiliser ses ressources) savent à quoi s'en tenir.

Quant à savoir si le poulpe à lunettes produit des résultats « scientifiques » ? Mystère... Le problème, ce n'est pas qu'il ne parvient pas à produire l'équivalent de ce qui se fait dans ces usines-poubelles que sont les revues, séminaires, colloques, contrôlés par les universitaires et leurs sous-fifres ; le problème, c'est que pour le savoir, il faudrait déterminer la signification du mot « scientifique ». Or, personne n'y étant jamais parvenu... Restons humbles. Lâchons l'affaire !

Ce qui est sûr, c'est que la micro-économie, pour prendre l'exemple symétrique, se pavane, se vautre dans le sérieux pathétique, mais ne parvient pas pour autant à en produire des masses, des résultats intéressants - ou alors, ils se planquent bien au chaud entre deux équations ésotériques. Pour preuve. Même si d'un strict point de vue médical, il ne fait aucun doute que Tirole est un psychotique errant dans les colloques..., on lui a quand même refourgué un faux « prix Nobel ». Alors à qui faire confiance !?

N'est-ce pas une manière de fuir le débat scientifique et la critique que de refuser leurs termes ?

C'est l'argument favori des croisés contre les minorités déviantes - dont les zététiciens sont le fer de lance. A preuve, leur harcèlement systématique des sectes, des complotistes (les illuminés frappés par la « psychose anti-OGM », comme Séralini), et des opposants à la théorie de l'évolution et à celle du big-bang. Ces derniers seraient murés dans leur monologues autistiques et refuseraient toute critique, toute discussion, de peur de ne voir leurs théories s'effondrer.

Sauf que ce déballage de haine ne repose sur rien de concret. Aucune enquête sérieuse n'a tenté de déterminer si les académiciens, autrement dit, ceux qui contrôlent les institutions, sont plus ouverts au dialogue que les autres ; s'ils optent véritablement pour des procédures plus transparentes ; s'ils sont plus enclins à publier des textes critiques à l'égard de leurs théories, etc.

Pire, cette argumentation trahit une confusion entre le contenu des théories défendues - jugé à priori mauvais - et les procédés de communication, d'échange utilisés par leurs adeptes. Le raisonnement est le suivant : le contenu est mauvais, donc, la personne ne veut pas en parler.

Joli sophisme et grosse ineptie sociologique.

  • Sophisme car il n'y a guère de moyens objectifs, transcendants (la science n'est d'aucun secours en la matière, pas plus que la logique...), permettant de discriminer entre les délires d'une secte et les délires d'une communauté de physiciens2. Donc on tourne en rond. Qu'est-ce qui est bon ? Qu'est-ce qui est mauvais ? Si ceux qui en décident appartiennent à l'un ou l'autre camp, ils sont juges et parties ; et on ne s'en sort plus.
  • Sociologiquement parlant, c'est indéterminé, ou au pire, contre-factuel. D'une part, la notion de communauté scientifique est vague, imprécise, empiriquement insaisissable. D'autre part, est-il prouvé qu'une personne ayant tort, ou plutôt étant accusée d'avoir tort, refuse obstinément le dialogue ? Il est plus probable qu'elle veuille en démordre ; qu'elle s'acharne à prouver la véracité de ce qu'elle avance ! C'est humain ! Sauf peut-être quand les conditions de sa libre expression ne sont pas établies. Par exemple, si elle n'a pas accès aux revues académiques ; ou si elle risque implicitement des « représailles » dès qu'elle profère des opinions non conformes. La donne n'est alors plus la même... Et n'est-ce pas le cas aujourd'hui ? Un physicien qui affirme croire aux OVNIS signe la fin de sa carrière scientifique3. Le fait est que les académiciens sont généralement sectaires, fermés, conservateurs, et qu'ils ont une exclusivité d'usage sur des procédés de diffusion4 dont le pouvoir d'impact est sans commune mesure avec les quelques livres auto-édités des pauvres hères qui croient dans le miracle des champs magnétiques sécrétés par les flux quantiques de l'âme spinéale. Alors qui supporte le moins bien la critique !? Les dominants ou les dominés ? Ceux qui réfutent une salve d'arguments (bons ou mauvais, telle n'est pas la question), d'un revers de la main, en s'exclamant d'un air dédaigneux (ou inquiet) : « encore une théorie du complot ! », ou ceux à qui on refuse les outils d'expression légitimes ? A voir...

En résumé, ce que la « science » académique légitime aujourd'hui, et ce qui en est peut-être un élément constitutif, c'est l'inversion des rôles de bourreau et de victime5... Pour un peu, les biologistes de métier arriveraient presque à faire passer les adeptes de l'Intelligent Design (certes difficile à cautionner) pour des censeurs de la théorie de la sélection naturelle. Pourtant, dans les faits, c'est évidemment l'inverse qui se produit ! Une minorité, certes bien armée, tente de s'imposer dans les espaces de publication légitime...

Vers une science coopérative et ouverte ?

Nous avons donc pris ici la défense des « dominés », accusés par les « dominants » (les gardiens du temple) de ne pas accepter la critique et l'ouverture, alors même qu'ils sont souvent plus ouverts.

Mais ce n'est nullement le but de cet article.

Eh oui ! c'était en fait une jolie digression d'école, car de toute manière, le Poulpe à lunettes, tel qu'il est conçu, n'est pas fermé à la critique. Au contraire ! Étant donné que tout un chacun peut venir publier dessus, il est de facto bien plus ouvert qu'une revue académique. En outre, le fait de ne pas imposer de forme sur le contenu est une manière d'ouvrir la porte à des critiques diversifiées, sans tenir compte de leur style et de leur apparence. C'est donc une manière de privilégier le fond sur la forme. Si un résultat est publié sur le laboratoire, et s'il y a de bonnes raisons de le remettre en cause, tant mieux ! C'est la seule manière de faire progresser les idées.

Mais on peut s'interroger sur le caractère profondément agressif et haineux de ce qu'on appelle critique, débat constructif, réfutation, du moins, quand ces termes sont portés par des tenants du pouvoir académique. Le plus souvent, ils correspondent à des joutes verbales primaires, qui n'ont rien à envier à des bagarres de matchs de rugby amateur - sauf que les bagarres de rugby amateur se font sur un pied d'égalité. Qu'une donnée soit défectueuse, et c'est tout de suite l'opprobre généralisée.

Ne serait-il pas plus simple, en cas de désaccord, d'utiliser des techniques de communication fondées sur la coopération, la compréhension mutuelle, la confiance, le dialogue ? Certes, le risque - comme d'habitude... - serait que de telles techniques soient utilisées pour convaincre les adeptes de théories minoritaires qu'ils ont tort. Mais bon... Malgré tout, même si cela reste un vœu pieux, on peut espérer qu'un désaccord théorique, idéologique, etc., puisse se solutionner autrement que par l'écrasement du faible par le fort.

Seulement, pour cela, il faudrait privilégier l'ouverture, la transparence, l'égalité, la liberté. Autant de valeurs qui sont antinomiques au fonctionnement de la machine scientifique industrielle. Si un article contient des erreurs, plutôt que de jeter son auteur dans l'arène des lions, pourquoi ne pas simplement tenter de les corriger ? Pourquoi ne pas lui en parler gentiment ? Qu'y a-t-il de compliqué, voire de révolutionnaire, à faire cela ?

Notes

1 L'expression est de Paul Feyerabend.

2 Ce terme de communauté fleure le lexique religieux, pourtant, il est utilisé à tout bout de champ !

3 Peu importe, à ce titre, qu'il y ait de très bonnes raisons de ne pas croire aux OVNIS. Tout comme il y a de très bonnes raisons de ne pas croire aux trous noirs sans disposer de preuves de leur existence... Sur ces sujets, L'interview de Jean-Pierre Petit sur La Voix de la Russie, adepte d'ufologie, me semble être une bonne illustration.

4 L'université, l'école, les revues scientifiques, etc.



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