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Blog sur l'économie non-marchande et la culture libre
Le journal des gratiférias / La revue de sociologie lo-fi / Le journal de la culture libre et du non-marchand / Les espaces de gratuité mobiles
Pourquoi lo-fi ? Par opposition radicale à ceux qui prétendent qu'il y aurait de la « bonne » et de la « mauvaise sociologie ». Lo-fi car on peut faire de la sociologie sans être mutilé, limité, aliéné par le style académique pompeux, réactionnaire, ultra-sérieux et politiquement correct qui colonise les revues académiques.
Conséquence, la sociologie lo-fi peut être mal écrite, traiter de sujets introuvables (ou pas), être non-marchande, anti-système, etc. Cette orientation « atypique » et le flou qui entoure la notion, font que certaines analyses sortent parfois du cadre du laboratoire.
 

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Vive l'inefficacité !

Auteurs : Benjamin Grassineau (voir aussi l'historique)
Date de création de l'article : 25-04-2016 05:18
Rubrique: La revue de sociologie lo-fi
Etat de la rédaction: en cours de rédaction
Droit de rédaction : ouvert
Licence : Licence culturelle non-marchande


Création de la page: 25 avril 2016 / Dernière modification de la page: 04 juillet 2021 / Propriétaire de la page: Benjamin Grassineau


Résumé :



C'est une tyrannie rampante mais implacable qui mine nos sociétés modernes, il faut être efficace, il faut faire du chiffre !

Cet argument de l'efficacité se rencontre partout, même dans les activités non-marchandes ! J'en veux pour preuve le nombre de fois, incalculable, où l'on m'a demandé si le magasin gratuit « marchait bien ». J'ai cherché, cherché, mais sans succès. J'ignore encore que répondre à une question aussi débile !

Depuis peu, je suis confronté à une autre manifestation de cette stupidité ambiante. J'ai lancé depuis peu des ateliers gratuits et on m'interroge régulièrement pour savoir s'ils marchent. Or, précisément, il se trouve que le bilan est mitigé en terme de fréquentation. Parfois c'est blindé, parfois non. D'où la pléthore de conseils que je reçois régulièrement d'experts avisés qui détiennent le secret de la réussite.

Il existe à ce titre deux catégories d'experts :

  • Les « conseillers techniques » qui se contentent de donner des conseils pour améliorer l'efficacité du dispositif, sans toutefois remettre en cause les principes de fond (gratuité, ouverture, libre-programmation, non-hiérarchie), et en se gardant bien de mettre la main à la patte. Ce ne sont pas les pires, mais ils restent quand même très pénibles.
  • Les « techno-fascistes », pour qui les principes de fond, la liberté, l'esthétique, sont de menus obstacles, de petites entorses au progrès, qu'il faut balayer d'un revers de la main pour assurer un meilleur fonctionnement du dispositif.

On aurait tort de croire que les techno-fascistes sont minoritaires et limité aux bureaucraties ou aux adeptes des techno-sciences. Ils sont au contraire très largement majoritaires dans le secteur associatif et militant, dans l'agriculture biologique, ainsi que dans le sinistre mouvement de l'ESS.

Qu'est-ce qui caractérise le mode de pensée des techno-fascistes ? En un mot, l'efficacité prime.

Prenons le cas des ateliers gratuits, ouverts et participatifs. En gros, le principe de ces ateliers est le suivant : chacun est libre de proposer gratuitement un service, une activité, et chacun est libre d'en bénéficier et/ou de les réaliser avec elle. Principe libéral ou libertaire qui est d'une simplicité désarmante.

Mais est-il efficace ? Sur de nombreux aspects, non ! Les ateliers sont parfois de mauvaise qualité - du moins, étant gratuits, ils renvoient une telle image -, attirent peu de monde, génèrent des frais pour ceux qui les « proposent ».

Du coup, les techno-fascistes se mettent en action. Car « au diable la liberté, il faut que ça marche ! ».

  • Premièrement, il faut faire payer les participants pour les responsabiliser. Processus magique qui doit sûrement fonctionner parce que ceux qui y participent y croient.
  • Deuxièmement, il faut une rémunération incitative pour ceux qui proposent des ateliers. Eh oui ! Tout en étant alternatif, on demeure quand même dans la glorification de la valeur travail. C'est l'expert, celui qui offre son savoir, ses compétences, qui doit être rémunéré. Évidemment. On ne va pas rémunérer l'élève ignorant ! Voyons !
  • Troisièmement, il faut faire appel à des personnes compétentes et pré-sélectionnées pour proposer des services de qualité, et donc faire venir du monde, et éviter toutes les dérives qui pourraient naître d'un système d'enseignement non-contrôlé - comment allons-nous faire si des inepties comme la théorie spinéo-quantique du monde physique intra-supra-luminique sont enseignées sur un pied d'égalité avec le modèle standard ?

Tous ces arguments sont formidables ! Et sûrement vrais ! Mais intrinsèquement antagonistes aux principes de liberté qui sont définitoires de l'échange non-marchand. Y souscrire, c'est donc se soumettre à ce puissant diktat de l'efficacité. Cela revient à abandonner des principes de liberté au profit de l'efficacité. Mais est-ce une tendance minoritaire ? Hélas non ! C'est extrêmement courant. Pire ! La référence à l'efficacité est devenue un passage quasiment obligé pour tous les réformateurs sociaux. Les monnaies complémentaires ? Il faut les adopter car elles sont plus efficaces pour créer du lien social. Les pédagogies alternatives ? Elles sont plus efficaces du point de vue des objectifs qu'on fixe à nos enfants - ils réussiront mieux -, d'où pléthore d'arguments scientifiques pour prouver qu'il vaut mieux parler à son enfant plutôt que de lui administrer une raclée bien méritée ! Les rapports marchands ? Passage soi-disant obligé pour celles et ceux qui organisent des événements, car il faut bien rentrer dans les frais ! La permaculture ? Méthode efficace qui confère un haut rendement agricole. Une basse-cour écologique ? On enferme les volailles pour ne pas qu'elles se fassent manger. L'échange de savoir ? On invite des experts rémunérés pour attirer du monde. Etc., etc., etc.

Ce qui caractérise ce techno-fascisme alternatif, c'est donc la déshumanisation et l'instrumentalisation du vivant au sens large. On l'enserre dans des processus, dans des dispositifs techniques, de manière à se rapprocher d'objectifs préfixés. Peu importe, dans le fond, que le vivant ait ses propres objectifs, sa propre autonomie, il faut le tordre, le plier, le formater pour qu'il vous obéisse !

L'enfant, dans les pédagogies alternatives, n'est pas perçu comme un être autonome qui a ses propres envies, ses propres aspirations, mais comme un « objet » qui doit se soumettre au diktat d'une techno-efficacité ! Les notions de liberté, de joie, d'amour, d'honneur, ou quoi que ce soit, sont complètement abandonnées. Il faut que ça marche ! Voilà tout.




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