Encore aujourd'hui, l'économie non-marchande fait l’objet de vives critiques. Ainsi, elle ne constituerait pas un système d’échange viable et fonctionnel pour satisfaire les besoins humains, elle aurait des effets délétères sur l’environnement et elle menacerait le travail marchand et inciterait à l’assistanat. On tend donc à la reléguer – et ce n’est pas un phénomène récent – dans les bas-fonds de l’utopie, voire, pour certains économistes qui vont jusqu’à contester son existence, dans le mythe.
L’observation montre pourtant que c’est loin d’être le cas. Et lorsque la réalité et la faisabilité d’un phénomène social sont niées avec un tel aplomb, il est à parier que des enjeux de pouvoir ne sont jamais bien loin. Cette dénégation s’insère dans une structure devenue presque invisible de domination de l’économie marchande qui modèle plusieurs dimensions : juridiques, idéologiques, politiques et sociologiques.
Moteur d’un changement social profond, l’économie non-marchande et réticulaire s’attaque aux fondements mêmes de cette structure en dévoilant, par l’expérience et par la pratique qui permettent un décentrage, les processus et les outils coercitifs qu’elle déploie de manière totalisante sur l’intégralité de l’espace social et de la réalité vécue. En opérant sur trois niveaux, le niveau individuel, le niveau intermédiaire (groupes) et le niveau macro-social, elle construit pas à pas des outils de régulation des échanges inédits et puissants, qui colonisent aujourd’hui des secteurs d’activités de plus en plus nombreux. Et ce qu’elle dessine devant nous, c’est un monde où le marché, sans disparaître entièrement, sera sans doute réduit à un rôle de simple figurant.
Mais cette transformation ne sera effective qu’à la condition que les acteurs du changement s’engagent pleinement dans la voie de l’économie non-marchande et renoncent à leurs intérêts marchands, sans se fourvoyer dans des formes insidieuses de marchés « alternatifs », à l’instar du marché de la subvention qui met au pas le tissu associatif, l’économie locale, l’économie sociale et solidaire, les SEL et les monnaies locales qui loin de sortir le marché de l’économie, le recentrent au contraire au cœur même de l’action contestataire et participent à son extension dans des domaines de l’existence où il était autrefois marginalisé.
-Salut à tous. Quelques petits commentaires ou questions :
est-il possible de faire en sorte de distinguer, dans ce brouillon collectif, qui écrit quoi ? Bien qu'à la fin et c'est très bien, tout sera fusionné dans un texte commun, je trouve intéressant de pouvoir identifier nos différentes prises de positions- ne serait-ce que pour apprendre à se connaître aussi.
Question technique ! Dans l'historique, on peut voir la contribution de chacun (en haut à gauche). Mais attention à mettre un nom d'auteur quand tu enregistres ta contribution. Dans le cas contraire, il prend juste ton adresse IP. Sinon, autre option, en mode édition wiki on peut signer les contributions comme ceci : 28-02-2024. Malheureusement, il n'y a pas de version colorisée des contributions comme sous framapad. Si tu es plus habitué, on peut basculer vers là bas. Aucun problème. J'archiverai ici de temps en temps. Dans le cas contraire, on peut aussi signer comme suit. C'est simple et efficace !! (Benjamin)
Je suppose que c'est toi Benjamin qui a écrit le texte ci-dessus ? Je trouve cette intro très bien.
J'avoue que j'ai fait un copier-coller d'un texte de présentation que j'avais déjà rédigé il y a quelques années ! C'était surtout histoire de lancer le mouvement. (Benjamin)
As-tu une idée déjà des différents points qui te sembleraient importants d'aborder ensuite dans ce manifeste ?
Je pense qu'on pourrait suivre une voie "introspective" et une voie plus "tournée vers l'extérieur". Dans la première, énumérer les points qui nous semblent pertinents dans les éditions de la gratuité : faire passer un message, construire des analyses socio-économiques (ou autres) dans un domaine encore assez peu étudié il y a quelques temps, avoir une posture auto-réflexive sur les pratiques de diffusion du savoir et une forme d'action cohérente. Dans la deuxième, il faudrait établir un tableau assez général des dynamiques et transformations sociales que nous aimerions analyser, décrire et évaluer dans notre ligne éditoriale : critique de l'économie marchande, fonctionnement et évolution de l'économie non-marchande, la révolution de la culture libre, le servage lié à la technique et l'approche convivialiste, etc. On pourrait rajouter quelques références bibliographiques en évitant si possible de verser dans l'académisme. (Benjamin)
Juste une interrogation sur le dernier paragraphe : tu parles du plein engagement nécessaire des acteurs du changement (dont nous espérons être j'imagine !) en pointant notamment l'importance qu'ils renoncent à leurs intérêts marchands. Mais même si nous donnions gratuitement toutes les productions des Éditions de la Gratuité, ce serait là en réalité une sorte de leurre, car l'argent qui serait mis dans l'asso pour permettre ces dons serait le fruit d'échanges marchands dans d'autres sphères (salaires, chiffres d'affaires, subventions, rentes,...). Donc ne vaut-il pas mieux reconnaître clairement que l'abstraction totale du système marchand est pour le moment impossible tant son emprise est globale, mais par contre qu'il est possible d'en détourner le principal média (l'argent) à d'autres fins ? Ce qui est une manière de contribuer à lui retirer de son attraction mortifère.
C'est effectivement un propos qui peut paraître radical et qu'il faut nuancer. Alors il y a plusieurs aspects. Tout d'abord, comme je te l'ai dit, c'est un copier coller ! Donc, à prendre avec du recul ! Deuxième aspect, je pense qu'il y a effectivement une distinction à faire car il est important de pas confondre ces formes d'économie marchandes alternatives avec des alternatives plus radicales, plus "profondes", comme l'économie non-marchande qui réinterroge la structure même de l'échange et les fondements mêmes de l'économie de marché, qui est toujours fondée sur l'exclusion, l'obligation et la "mesure" des activités, des biens et des personnes (le prix, les heures de travail, la valeur marchande, etc.). Je maintiens qu'il faut bien insister sur la différence. Cependant, il y aurait beaucoup à redire sur les approches intégrales. Tant au niveau individuel qu'à un niveau sociétal plus global. Je ne suis pas adepte, presonnellement. Et c'est actuellement complètement irréaliste. En revanche, je suis adepte d'une approche en terme d'équivalent gratuit (concept que j'ai forgé à partir de la pratique). Mais les sensibilités sont assez variées à cet endroit et le manifeste devrait en tenir compte. Entre ceux qui veulent installer une boîte à livres subventionnée dans un parking de grande surface et des squatteurs qui refusent de toucher à l'argent, qui fuient le troc et qui voudraient supprimer la propriété privée, il y a un hiatus. Cependant, je pense que toutes ces sensibilités peuvent être englobées dans un même mouvement. En revanche, ce qui pose davantage problème, c'est la confusion qui est souvent faite entre des pratiques économiques alternatives marchandes et des pratiques non-marchandes (qui peuvent d'ailleurs être associées à des intérêts marchands très puissants à l'instar de ce que fait Google !). Comment intègre-t-on ce questionnement dans le manifeste ? Et comment met-on en avant les effets parfois délétères de cette confusion, qui tend à faire du marché un simple accessoire quasi-neutre, naturel au service de la régulation des échanges, alors qu'il est parfaitement artificiel et qu'il les modèle en réalité en profondeur ? Eh bien, j'ai une proposition. 1. Cadrer notre thématique en définissant notre champ d'analyse (est-ce qu'on inclut, notamment, l'économie non-marchande directement fondée sur la redistribution étatique) et en développant les deux points que je viens d'aborder (distinguer entre économie marchande et économie non-marchande et laisser la place à des sensibilités très larges sur les programmes d'action). 2. ensuite, ces points là pourraient faire l'objet d'un développement ultérieur dans un des articles qui viendrait en complément du manifeste. Je peux m'engager à le faire. D'ailleurs, ça tombe bien car il y a longtemps qu'il faut que j'écrive un article synthétique sur ce sujet !! (Benjamin)
Comme points à aborder dans ce manifeste je propose :
-Développer un peu dans l'intro les multiples et complexes dégâts engendrés par la compétition économique permanente et l'avidité qu'elle nourrit ? -- Ok. Ca me paraît aussi important. (Benjamin) -Développer ensuite les idées contenues dans l'objet et les moyens des statuts - et pourquoi c'est important de faire cela... -- Oui clairement ! (Benjamin) Michaël
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