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Pourquoi lo-fi ? Par opposition radicale à ceux qui prétendent qu'il y aurait de la « bonne » et de la « mauvaise sociologie ». Lo-fi car on peut faire de la sociologie sans être mutilé, limité, aliéné par le style académique pompeux, réactionnaire, ultra-sérieux et politiquement correct qui colonise les revues académiques.
Conséquence, la sociologie lo-fi peut être mal écrite, traiter de sujets introuvables (ou pas), être non-marchande, anti-système, etc. Cette orientation « atypique » et le flou qui entoure la notion, font que certaines analyses sortent parfois du cadre du laboratoire.
 

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Du sérieux en sciences sociales

Auteurs : Benjamin Grassineau (voir aussi l'historique)
Date de création de l'article : 2008
Rubrique: La revue de sociologie lo-fi
Etat de la rédaction: finalisé
Droit de rédaction :
Licence : Licence culturelle non-marchande


Création de la page: 26 novembre 2013 / Dernière modification de la page: 25 décembre 2022 / Propriétaire de la page: Benjamin Grassineau


Résumé : En gros, ça parle des gars qui, peut-être parce qu'ils sont mal dotés par la nature, se vengent en se masturbant sauvagement devant leur liste de publications... Publié dans À Poil 1 sous le pseudo Gorgias le grignou. Prière de le diffuser à tous les profs cons... autant dire que c'est un pléonasme.



« Celui qui peut attribuer un chiffre à un texte est un con »

Hall. Gd. Amphi. Sorbonne, Journal mural mai 68, Sorbonne, Odéon, Nanterre, etc... Citations recueillies par Julien Besançon, Tchou, 2007, p.139.


Le monde se compose, selon certains, de deux variétés d’individus : ceux qui sont sérieux et ceux qui ne le sont pas. Les uns ont le droit à la parole, les autres ont le droit de se taire.

J’ai discuté récemment avec un prof de fac réputé. La première chose qu’il m’a demandé, c’est : “vous avez des publications ? des publications internationales ?”. Je ne lui ai pas craché à la gueule parce que j’ai pensé au même moment aux fremens de Dune, et je me suis dit que pour eux, ce serait du gâchis. Je lui ai simplement balancé : “Oh moi,je suis pour l’auto-publication”. Ce à quoi il a répondu : “Alors pourquoi vous faites une thèse, vous ne voulez pas être maitre de conf ?”.

Ce pauvre bigleux, très laid, con et aigri, dont je ne citerai pas le nom pour ne pas avoir de problèmes, est ce qu’on pourrait appeler un cas d’école… Pour lui, être sérieux, ça revient à accumuler des publications cotées. Et c’est donc un truc de virilité, c’est dominer l’autre, c’est écraser le plus faible. Dans l’absolu, c’est cela. Point. Tous ces marchands de culture - universitaire, conservatrice, alternative ou gauchiste - sont sérieux parce que si tu l’es pas, t’es moins qu’une tafiole ! Si t’es pas sérieux, t’es une sous-bouse. T’es pas crédible.

Pour tous ces détecteurs de bouse, être sérieux, ça se ramène à faire de la merde propre. Une merde, c’est à dire un article, une thèse, une oeuvre d’art, un morceau, une toile ou un concert, ça doit être un truc réussi, donc sérieux. Ca peut être pourri. Mais ça doit être sérieux. A mon avis, si on cherche à définir ce qui est malsain dans la culture occidentale, on tape dans le mille avec la notion de sérieux. Ce qui est anti-conformiste, provocant, alternatif, ça n’est qu’une forme raffinée de merde culturelle occidentale sérieuse. En revanche, ce qui n’est pas sérieux - le tuning ? - sort du jeu. On peut l’oublier en détournant la tête, d’un air gêné.

Je dois dire que ça me gave franchement d’être sérieux. Je n’ai pas envie de prendre au sérieux tout cet héritage occidental pesant, qui va de Platon à Noir Désir, en passant par Shakespeare et Duchamp. Le sérieux, c’est pour les vieux. L’erreur, c’est cool. J’aime l’erreur. Faire des fautes, me tromper d’auteur, mal utiliser des verbes, Pfouiiii…. je respire !

Le sérieux pour moi, c’est Hitler, Napoléon, Staline, et tous les profs, artistes, et autres intellectuels qui ont sagement veillé à leur ascension et à entretenir la mémoire de leurs actes odieux. Le sérieux, à mon sens, c’est le fait d’être tellement dans la merde qu’on est même plus capable de balancer une vanne sur son triste sort. Alors oui, ce jour là, on a le droit d’être sérieux ! Mais le reste du temps, être sérieux, c’est ne pas comprendre à quel point il est marrant de prendre une chaise et de se coller devant des poules en liberté pour les regarder vivre leur vie. C’est se prendre la tête sur ses fringues, mais de manière chiante. Il n’y a rien de plus désolant que ces gens sérieux qui peuplent ce vaste monde. Autant dire, donc, qu’il n’y a rien de plus glauque et pathétique qu’un prof de fac qui prend au sérieux les articles qu’il écrit et les maigres apparâts du prestige universitaire qui font toute sa fierté. C’est nul ! C’est désastreux ! Dire avec assurance qu’un article ou un travail n’est pas sérieux, c’est être vraiment très con. Et c’est aussi effacer la joie de vivre de ceux qui l’ont. Et pourtant, vous pouvez vérifier, même le plus alternatif, le plus gauchiste des universitaires rencontre toujours une limite à sa rébellion : l’autel sacré de la publication. Ce moaï, aujourd’hui organisé en marché, c’est le dernier bastion de la culture occidentale. Pas un seul mouton d’universitaire qui a assez de couilles pour dire, “arrêtons-là ! Toute cette mascarade de la course à la publication, c’est de la merde !”.

Un exemple. Le mouvement du logiciel libre est de plus en plus pollué par des gens qui se veulent sérieux. Il y en a plusieurs types.

  • Tout d’abord, il y a les informaticiens sérieux, pas forcément les meilleurs, pour qui la programmation est un truc sérieux, une affaire de gens intelligents et de spécialistes. Tu parles ! La programmation, c’est comme les maths, c’est à la portée du premier venu ! Il faut juste aimer les nuits blanches et être bien aiguillé…
  • Y a aussi les branchés du libre. Pour eux, un bon libriste se mesure à sa capacité à utiliser comme il faut les termes informatiques et à défendre correctement l’orthodoxie du libre. Ces gens-là aiment pas les plaisantins. Un bon libriste, c’est un gars sérieux qui a bien intégré tous les rouages de la religion du libre. Je sais pas comment dire, mais ces gusses me font chier. Y a jamais un truc qui doit être de travers, tout doit être clean, les articles doivent être cohérents, on doit pas faire de fausses notes. Pfouuuh… Mais comment ils font pour respirer ?!
  • Autre cas pathologique, les universitaires qui se sont mis sur le créneau du libre. Dramatique, affligeant, désolant. Le triste spectacle de la misère humaine. Au sens propre. Déjà, un truc. La plupart d’entre eux, comme l’autre con de prof dont je parlais en intro, sont vieux, rangés, pris dans la compétition universitaire et sérieux. Comment voulez-vous, avec ça, qu’ils comprennent l’essence du logiciel libre, qui est produit, le plus souvent, par des jeunes, branchés sur l’alternatif, ignorant le plus souvent la compétition lamentable et inhumaine qui sévit dans la recherche universitaire, et fonctionnant de façon ludique et peu sérieuse ? Comment voulez-vous que ces vieux cons, puisque c’est l’appellation qui leur convient le mieux, comprennent des délires post-adolescents ? Moi-même, je commence à avoir du mal me replonger dedans, alors ces vieux déchets, comment espérer qu’ils comprennent quoi que ce soit à la fougue du post-ado ? Eux qui n’ont probablement jamais détruit un lampadaire à coup de pied ou ragassé des meufs dans la rue. Ces vieux croûtons veulent du sérieux et ils font du sérieux. Et ils inventent du sérieux là où il n’y en a pas. Quitte à déformer la réalité. Faute de quoi, d’ailleurs, ils passent pour des bouffons devant leurs collègues. Et ça, c’est le hara-kiri assuré.

Mais je reviens à mes moutons, ça ne veut rien dire d’être sérieux, d’écrire des trucs sérieux, propres, sans faute, chiants à lire. D’une part parce qu’on perd un temps considérable à cleaner des articles, alors que l’idée de fond est souvent ultra-basique. D’autre part, parce qu’on filtre, en faisant cela, des milliers d’articles fantastiques qui ne sont pas assez sérieux pour être présentables.

Je n’ai donc qu’un truc à dire pour conclure. Publiez de la merde. N’attendez pas de faire un truc propre. Saccagez vos textes avant de les refourguer sur la toile ! Une revue sérieuse, comme la Revue Française de Sociologie, c’est une revue de néo-conservateurs qui s’ignorent. Rien ne vaut un bon picnic dans un endroit paumé où on mélange sa bouffe n’importe comment. Ca c’est bon. La bouffe française où on peut même pas baiser sa partenaire sur la table, ça c’est relou. Rien de plus gonflant qu’un snack-bar de prolos, ou un resto huppé avec ses étoiles au guide michelin - pour moi c’est les mêmes. Au moins, en picnic, près d’une cascade reculée des Pyrénées, vous êtes libre ! Vous pouvez bouffer vos sardines à la banane, en vous essuyant vos mains sur la culotte de votre copine ! Une bonne pizza devant un film hollywoodien, en baisouillant tranquille, voilà la liberté ! Une soirée sinistre devant un film d’auteur, où vous craignez de lâcher une caisse, voilà l’enfer !

Eh ben, c’est pareil pour les revues. Une revue où vous avez pas le droit de dire un mot de travers, faire une faute, mal citer un auteur, c’est une revue de coincés du cul qui pue. Point. C’est une revue chiante et sinistre. Boycottez-là.

Et vive la liberté !

Catégories: Recherche conviviale




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